Quel plat est incontournable en Suisse, dans les restaurants de bord de lac ? Des filets de perche meunières avec frites! Mais saviez-vous que le 90% des filets de perches consommés en Suisse provient de l’étranger, de l’Estonie principalement ? Il n’y a tout simplement pas assez de poissons dans les lacs suisses pour satisfaire cet engouement. Les « perches du lac » ont parfois effectué un bien long voyage depuis leur endroit de pêche jusqu’à nos assiettes. Une alternative existe pourtant : consommer de la perche d’élevage, née et élevée en Suisse : la perche Loë.
Sachez aussi que le filet de perche meunière n’est pas une fatalité, la preuve avec le jeune Chef Benjamin Luzuy, dont l’imagination et le talent ont séduit blogueuses et journalistes conviés récemment pour un repas dégustation au Conte-Goûts, joli espace de dégustation et traiteur à Lausanne. J’ai eu le privilège de faire partie du groupe de testeurs, voici mon reportage.
La perche en apéritif
C’est David Morard, directeur de La Perche Loë qui nous accueille et nous met tout de suite dans l’ambiance. Il nous sert tout d’abord un grand verre d’eau du Lötschberg, l’O tout simplement, idéale pour ce jour de canicule.
Quant à Benjamin Luzuy, il nous présente un tartare de perche et fleur de badiane sur une petite tartelette de purée de petits pois. Parfaite mise en bouche, le tartare est léger et se marie très bien avec la purée de petits pois. Le voyage est bien parti!
Pour la suite, il nous sert une mousse de perches surmontée de billes de citron poivre dans des cônes croustillants au charbon végétal. Un mélange parfait de saveurs, de couleurs, de consistance entre le croquant des cônes et la mousse de perche. Délicieux.
Arrive ensuite une belle assiette de perche fumée, découpée en petits morceaux assaisonnés d’un filet d’huile d’olive au citron. La consistance de la perche fumée est parfaite, onctueuse et goûteuse.
Pour terminer l’apéritif, nous dégustons des acras de perches Loë au gingembre et citron vert, accompagnés d’un gel de mangue. Vraiment très bon, une combinaison parfaite aux saveurs orientales.
Une bien belle mise en bouche, nous sommes prêts à passer à table. Notre curiosité ainsi aiguisée, les questions fusent. D’où viennent ces perches, pourquoi cette appellation, pourquoi avoir fait appel à Benjamin Luzuy, bref nous voulons tout savoir!
Un produit de qualité 100% suisse: la perche Loë
David Morard, directeur de La Perche Loë , nous présente avec passion et enthousiasme le circuit des perches Loë, dont le nom vient du patois fribourgeois, Loë veut dire « pic des montagnes ». A l’écloserie Percitech à Chavornay dans le canton de Vaud, les œufs et les semences sont récupérés afin de procéder à la fécondation, puis à l’incubation. Chaque mois les œufs sont délicatement récupérés à la main, tandis que les couples reproducteurs sont renouvelés tous les 3 à 4 ans avec des œufs issus du lac de Neuchâtel. Après 4 mois, les alevins sont prêts à être transférés dans les bassins d’eau cristalline de Valperca à Rarogne. Les perches y vivront 8 mois environ avant de se retrouver sur les étals des restaurants et de la grande distribution en moins de 48 heures, après filetage partiellement manuel.
A Rarogne, les perches grandissent dans une eau très pure venue des profondeurs des roches de la région du Lötschberg, qui jaillit à 19°, découverte lors du percement du tunnel. Un produit 100% suisse, de l’oeuf au filet, naturel et de qualité, élevé sans antibiotiques ni hormones de croissance et recevant une alimentation 100% naturelle.
Grâce à leur savoir faire développé depuis une vingtaine d’années et au principe de la ponte décalée, les éleveurs peuvent compter sur une pêche chaque mois. L’eau ne nécessite qu’un léger réchauffement jusqu’à 21°, elle est pure, à température constante, sans parasites ni hormones de croissance ni antibiotiques. Elle peut donc ensuite être recyclée dans un cours d’eau voisin. Les perches produites sont de tailles identiques, un peu plus grandes que les perches grandies dans les lacs suisses. Leur goût ne varie pas, l’eau du Lötschberg étant de qualité constante, ce qui n’est pas le cas des eaux des lacs. Tout le processus d’élevage garantit ainsi un approvisionnement constant en perches de grande qualité.
Voyage culinaire avec Benjamin Luzuy
Après ces explications, nous sommes prêts à passer à table pour déguster ce que Benjamin Luzuy et Jordan Morisset nous ont préparé. Benjamin Luzuy est un jeune chef entrepreneur genevois, diplômé de l’Ecole Hôtelière de Lausanne. Il dirige plusieurs restaurants à Genève et bientôt à Lausanne et est connu en Suisse romande notamment pour avoir animé l’émission de la RTS Descente en cuisine. On peut découvrir son talent chez Bottle Brothers aux Eaux-Vives, au Grand Bottle à Vésenaz, au restaurant Le Chef à l’aéroport de Cointrin, au Voisins espace de coworking, chez Gourmet Brothers traiteur et tout bientôt au Café des Philosophes à Lausanne. Ses yeux brillent quand il nous décrit les plats que lui ont inspirés les perches Loë. Il est inventif, curieux, passionné et excellent communicateur.
La perche Loë marinée
En entrée, Benjamin a mariné les filets de perche Loë et les sert accompagnés de rhubarbe marinée au sureau, d’un peu de yaourt au raifort et de quelques feuilles de capucine. Alors là, nous sommes au 7ème ciel! J’ai trouvé ce plat absolument divin, des saveurs si subtiles se mariant parfaitement et dégageant une vraie émotion. Génial!
Filets de perche revisités
En plat principal, des filets de perche Loë juste snackées, des giroles au chasselas et abricot, une sauce au chasselas goûteuse et parfaitement assaisonnée, accompagnée de pommes de terre au siphon beurre noisette. On pourrait se croire en Valais!
Dessert provençal
En dessert, une simple salade de fruits rouges infusés à la lavande avec une glace au yaourt et huile d’olive. Ce dessert à première vue tout simple est une belle découverte et nous transporte immédiatement en Provence!
Des vins de Suisse romande
En accompagnement, Benjamin Luzuy a sélectionné des vins de qualité, légers et parfaitement adaptés aux différents mets: un chasselas du canton de Vaud les Brachières 2015 de la Maison du Moulin à Roverolle, une délicieuse petite ravine 2015 du Valais de chez Philippoz Frères et un pinot noir 2015 de Colombier, Domaine de Vaudijon, Neuchâtel. Un petit tour de quelques vignobles de suisse romande!
En résumé
J’ai été complètement bluffée par ce qu’on peut faire avec un produit tel que ce filet de perche naturel, qu’il soit cru, mariné, poêlé ou fumé. La chair de la perche Loë grandie à l’eau des montagnes est ferme, contrairement aux traditionnels filets de perche meunières. Le goût n’étant pas très prononcé, la perche Loë bénéficie d’assaisonnements divers et variés, d’associations plus audacieuses. Encore faut-il le talent d’un chef comme Benjamin Luzuy, parfait ambassadeur de cet excellent produit du terroir suisse. Un voyage parfaitement réussi!