A 94 ans, René Berger était certainement un des blogueurs le plus âgé, si ce n’est le plus âgé. Mais quel esprit jeune dans ce corps vieilli! Le philosphe René Berger est parti explorer d’autres mondes la semaine dernière. René Berger était un homme du futur, un visionnaire (ils sont si rares en ce pays!) un érudit résolument moderne,  plein d’humour. Ceux qui ont eu la chance de l’entendre au moins une fois en conférence ne l’oublieront pas.

La grande révolution, c’est pour moi l’Internet où l’on voit, où l’on vit, que le monde n’est pas fait d’unités, mais de connexions. Jusquâ€™à  présent le monde s’est groupé en sociétés, en gouvernements, en pays. Pour la première fois nous sommes dans un réseau qui n’a pas de centre et c’est ce que certains gouvernements ignorent, lorsqu’ils demandent qui contrôle l’Internet et le Web. […]  Avec le Web, je peux m’adresser à  n’importe qui, n’importe quand et n’importe où dans le monde.

A mon époque j’ai pratiqué Foucault, Deleuze, et le goût des mondes différents, les Égyptiens surtout. C’est un goût que je partageais avec mon fils Jacques-Edouard qui n’est plus. Voyager avec mon fils m’a beaucoup fait connaître d’autres types de civilisations. Aujourd’hui nous vivons avec d’autres mythologies et pour ma part je vis tous les jours «Â philosophiquement » avec le Web. L’ordinateur m’interroge sur ma propre ignorance, il excite ma curiosité et mon intérêt pour la vie que j’ai toujours confondus avec la vie elle-même.

J’essaie de voir les indices de ce qui va peut-être venir ou changer. J’essaie par ces indices d’inventer l’avenir car je crois que nous sommes en attente d’un changement radical qui fera de nous une espèce fondamentalement modifiée, un «Â homme réseau ». Ce n’est plus un homme seul, ce n’est plus un homme dans l’habitude des structures nationales et familiales, c’est un homme intégré dans les réseaux et que les réseaux intègrent.

In Conversation avec Madeleine Gobeil -2006-2007, Lausanne

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